Par Sandrine Tinturier.
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L’influence du cinéma envahit la photographie dès les années 1930. Sur le modèle des stars d’Hollywood, nouveaux idéaux de beauté à la Une des magazines, les femmes se mettent en scène. Prenant des poses maniérées, elles se font pin-ups, starlettes d’un instant, elles « bluffent, exagèrent, se divinisent spontanément » devant l’objectif.
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Cédant à la mode des bains de soleil, deux soeurs posent dos à dos dans la chaleur de l’été niçois. Chacune rend son corps expressif, joue de ses atouts et maitrise, à sa manière, les paramètres de la séduction. La blonde Marcelle dans un maillot nouvelle génération met son corps en vedette en prenant une pose de pin-up, la mine un rien arrogante, le regard un rien provocant. Appuyée contre elle, Moune, bien plus habillée, rayonne d’un seul sourire. Son allure est élégante, naturellement altière. L’allure et la tenue d’une star parce que « l’importance d’une star est en rapport inverse avec la quantité de jambes montrées dans les photographies » (Margaret Thorp). L’une offre une incursion dans l’intimité de sa chair exposée, l’autre n’a, semble-t-il, besoin d’autre atout que son sourire, pour conquérir l’objectif. Elle a « cette attitude d’exquise modestie qui provoque l’éblouissement suprême », l’apanage des stars pour Edgar Morin.
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C’est en déesses de papier glacé que les soeurs s’inscrivent dans l’album, l’histoire de la famille et la postérité. La photo, comme pièce à conviction, saisit une jeunesse et une beauté amenées à s’évaporer. Plus bavardes que les visages et les formes, sont les postures, qui, même héritées d’une époque et d’un milieu, révèlent la coquette blonde et l’élégante brune. La mise en scène de leur corps, leur façon de se présenter au monde avec un surcroît d’érotisme ou avec une simplicité d’un charme désarmant, dévoilent ce qu’elles sont, ce qu’elles seront peut-être. Dos à dos.
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Collection Raphaëlle Ronin*
(* Raphaëlle est la petite fille de Moune)