Par Alice Audrezet, chercheure à l’ISG Lab, ISG International Business School Paris et Béatrice Parguel, chercheure CNRS, Paris Sciences et Lettres .
#1 La “mode pudique”: concilier mode et religion ?
Si mode et religion entretiennent depuis longtemps des liens étroits, les créateurs se cantonnaient jusqu’à récemment à une lecture avant tout esthétique et non-confessionnelle du fait religieux, comme l’illustrent quelques emprunts ou détournements parmi les plus créatifs dans l’histoire de la mode.
Depuis quelques années toutefois, les créateurs semblent être allés plus loin en proposant une offre de vêtements et d’accessoires plus amples, plus couvrants, plus longs, et finalement plus compatibles avec un certain nombre de considérations religieuses. De Sao Paolo à Jérusalem en passant par l’Europe et les pays du Golfe, des chrétiens, juifs et musulmans adoptent une mode plus conforme aux règles dictées par leurs croyances, générant ainsi un nouveau segment de marché, celui de la mode pudique, définie comme une mode qui intègre des considérations de pudeur, souvent d’origine religieuse.
Ciblant principalement des femmes pratiquantes, la mode pudique n’est pas un simple un effet de mode. Soutenue par le développement du commerce en ligne et une communication digitale innovante, et notamment par une blogosphère extrêmement dynamique (voir ci-dessous quelques exemples de comptes Instagram d’influenceuses mode pudique), elle s’est rapidement fait une place au sein de l’industrie globalisée de la mode.
Saison après saison, l’intérêt des consommateurs pour la mode pudique se confirme. Ce nouveau segment de marché pourrait atteindre 373 milliards de dollars d’ici 2022[1].
[1] « The big business of modest fashion », The Washington Post, Louisa Loveluck et Nathalie Naccache, 4/10/2018.