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Par Sandrine Tinturier.

Il est des vêtements qui nous rendent plus beaux, des habits qui, en modifiant notre manière de nous tenir, de nous mouvoir, donnent de nous une image différente, nous modèlent en un autre plus élégant ou plus désirable. Et puis, il y a aussi des vêtements qui ont le pouvoir d’intensifier notre sentiment d’emprise sur le monde.

Le monde appartient à ces petits cowboys armés jusqu’aux dents, immobilisés dans la cavalcade de leur jeu, le temps d’un cliché. Pour la postérité. Ces petits garçons ont l’avenir devant eux et quel avenir ! Trente années glorieuses, au bas mot. Un futur aussi vaste et prometteur que les plaines du Far Ouest. La vie devant, comme un espace sauvage à conquérir, et l’âge de tous les possibles.

De la chemise des pionniers à celle des petits cowboys d’opérette, il y a un monde évidemment. Les médias de masse, les comics et, bien sûr, Hollywood et ses westerns, ont entretemps retaillée cette chemise. L’Amérique l’a rendue spectaculaire en l’augmentant de broderies, de couleurs joyeuses, de découpes codifiées et de boutons-pressions de nacre. La douteuse one week shirt des cowboys de la conquête de l’Ouest a aussi gagné en propreté. Les rêves de conquête de territoires ensauvagés ont croisé les rêves de confort moderne des ménagères des années 1950. Les mères de famille mettront tous leur amour et les moyens domestiques dont elles disposent pour que les panoplies de conquérants soient rutilantes, pour que leur baby-boomer de fils soit le plus beau cowboy du quartier. Résolument optimistes, elles penseront, tout en boutonnant les shotgun cuffs* surchargés de boutons inutiles de la petite chemise, qu’assurément on allait vers le un monde meilleur.

* Type de poignets formant manchettes et criblés de boutons.