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Actualité 11 octobre 2021

[RETOUR DE DÉFILÉS]

Le défi de l’inclusif à travers la mode afro- européenne de Kenneth Ize.

Par Emilie Belkessam.

Kenneth Ize, dont le vrai nom est Izedomwen, est né à Lagos au Nigéria en 1990, puis est arrivé en Autriche à l’âge de 4 ans, suite à l’exil politique de son père. Très vite attiré par la mode, le jeune Kenneth raconte que lorsqu’il était enfant, il aidait sa mère à choisir les tissus de ces vêtements traditionnels, qu’elle confectionnait de ses mains pour les occasions dominicales. Le designer hérite donc d’un vivier d’inspirations particulièrement riches de ces familles immigrées d’Afrique noire vers le vieux continent, de ces populations entre deux rives, dont beaucoup d’entre nous sommes, s’efforçant de concilier des civilisations quelque peu distinctes sans en perdre l’essence. Il étudie à l’Université des arts appliqués de Vienne et en sort diplômé en 2013, ayant complété sa formation avec Bernhard Wilhelm ou encore Hussein Chalayan, dont on verra plus loin qu’il aura hérité du parti pris politico- culturel de ce dernier, entre critiques sociales, militantisme et goût pour la technologie ; on se souvient tous de la collection de Chalayan Afterword pour l’automne- hiver 2000, véritable prouesse d’un point de vue du design, comme de la mode en général, qui aura marqué la toute fin du XXème siècle.[1]

Depuis, Ize a été finaliste du prix LVMH en 2019 et co-lauréat du Arise Fashion week Award pour le prix du Designer of the Year. Vivant désormais dans la banlieue de Lagos à Sabo Yaba, Ize s’évertue, pour son label, à réinterpréter les classiques de la mode d’Afrique de l’Ouest et notamment du Niger, le tout en collaborant avec des tisserands nigérians – donc locaux – et autres créatifs de la région. Un choix d’implantation tout à fait inédit, quand on sait que la mode se crée surtout dans les grandes capitales des pays du Nord. Très impliqué dans la vie artistique du Niger, Ize participe aussi aux programmes d’arts créatifs des écoles locales en soutenant une mode traditionnelle et des savoirs- faires anciens. Il confiait ceci au New York Times en mai 2019[2] :   Were reviving, reinterpreting and giving new context to artisan techniques that have given meaning to West African identity”[3]. Sa mode est éminemment politique : grandir entre deux continents lui a sans nul doute permis d’observer que si un marché dit occidental domine le monde de la mode, les talents eux sont internationaux. Et quand bien même la mode des pays dominants[4] s’inspire fréquemment de l’ailleurs, « d’exotismes » – souvent construits -, inclut-elle pour autant ces artisans perpétrant des savoirs-faire plus que millénaires ? Rien n’est moins sûr. Et c‘est justement là que le bât blesse. En attendant, Ize a accompli l’exploit de construire sa propre usine, la plus grande du Niger, employant rien moins qu’une trentaine de tisserands. Car cette technique de tissage Asoke[5] ou aso- oke est une composante majeure de sa mode, de son identité et du message qu’il tâche de faire passer. Et il y a encore nombre de choses à découvrir de la mode de ces ailleurs, pas toujours aussi lointain qu’on voudrait le penser, notamment quant à la façon de considérer le luxe.

Au Niger, comme il était encore en France dans la première moitié du XXème siècle, le luxe vestimentaire n’est pas l’apanage d’une certaine classe, mais un élément de sophistication très courant. Comme l’indique Gilles Lipovetsky, dans un entretien au journal La Tribune : « Depuis trois décennies, la surface sociale et économique du secteur a profondément changé. Jusqu’alors et depuis l’âge moderne au XIXe siècle, le luxe était porté par de petites entreprises familiales indépendantes qui composaient une industrie artisanale. […] Le problème de fond est que le luxe est désormais pluriel. Une partie de l’offre est absolument inaccessible tandis qu’une autre est devenue accessible – eau de toilettes, bâton de rouge à lèvres, etc. »[6] S’il demeure une certaine homogénéité du luxe, en France par exemple, c’est par le prisme de produits dérivés (plus communément qualifiés de brand stretching tels que les parfums, ou encore les rouges à lèvres, encore abordables, quand un blazer de la même marque atteint en moyenne le prix de deux SMIC mensuels et devient pour la majorité absolument inaccessible (et donc plus aussi courant que l’était autrefois une veste Chanel).

Pour autant, et aujourd’hui encore, présenter sa mode à Paris, c’est intégrer un système élitiste, qui sera bien entendu copié par les marques de fast fashion, à destination de la masse. Ize quant à lui, étant à la tête d’une griffe et non d’une Maison, distribuée par des revendeurs tels que Alara, SSENSE ou encore Browns, casse avec cette logique des grands groupes, en faisant de sa mode un luxe relativement abordable, à celui du commun qui voudrait s’offrir une pièce, comme hier le patriarche italien des années 1950 offrait une fourrure, inscrivant ainsi sa réussite sociale sur les épaules de sa femme, soit aux yeux de tous.[7]

Ize est un enfant de la diaspora, mais très européen aussi et épris des usages dits occidentaux. Sa griffe, il l’a financée par une campagne GoFundMe, à l’heure où les banques demeurent réticentes à faire vivre les projets des créatifs. En cela, sa mode se veut démocratique, par, et pour le peuple. Après avoir collaboré à la marque Karl Lagerfeld pour une collection capsule, son premier chèque a ainsi pu servir à ouvrir cette usine nigériane, relocaliser la confection de ses pièces et mettre au point de nouvelles techniques. Plus qu’une proposition esthétique, avec ses vêtements Ize a bien l’intention de faire renaître une industrie qui avait alors disparu, en la modernisant bien entendu. The only way to preserve and revive those things is not only to start making them again in a very modern way, but also to be forward-thinking.”[8] À l’instar de cette employée qui a apporté à la collection une technique d’ajout de pics dans les fils du vêtement aso- oke, leur octroyant une texture plus solide. Les talents sont bien internationaux.

Son itinéraire est celui d’un enfant de la diaspora Ouest africaine, ayant réussi en Europe et qui décide d’aller renouer et rendre à son pays d’origine, tout en contribuant à son développement. Tout serait parti des tenues que sa mère portait, le dimanche seulement, une fois installée en Autriche ; des robes traditionnelles radieuses, accordées aux tenues de son frère et lui -même, qu’on imagine forcément vives et colorées, loin des standards de grands renoncements[9] qui sévissent en Europe.

Ne souhaitant nullement se contenter de copier d’anciens modèles, Ize entreprend de les réinterpréter afin d’ouvrir de nouveaux territoires, une voie plus solide de la mode de ce continent qui exporte encore peu ses créations. Et loin de se contenter de designer des modèles, Ize met un point d’honneur à déployer le réseau de tisserands africains (de l’Ouest) afin que ce patrimoine soit davantage connu de ses acheteurs, une audience plus hétéroclite désormais.

Cette technique qu’il exalte, est celle du aso- oke, où le textile est tissé à la main par – notamment – les membres du peuple Yoruba. Loin d’une posture misérabiliste, il s’exprimait ainsi sur ses débuts à Lagos en 2016 : « J’ai commencé à écouter les histoires des artisans et j’ai été dépité de découvrir qu’on ne pouvait pas vivre d’un talent aussi exceptionnel. » Sensibilisé au discours sur l’appropriation, que l’on doit à un autre Kenneth, Kenneth Coutts- Smith, Ize choisi d’inclure les héritiers – dont il est part – à son projet.

La démarche d’Ize a cela de particulier qu’elle s’inscrit dans une volonté de créer la mode autrement : là où l’on a pu reprocher à de grandes Maisons de s’approprier des savoir-faire, héritages et autres bagages de peuples peinant à survivre dans un monde encore divisé entre pays du Nord et pays en voie de développement, dit-on aimablement, Kenneth choisit de mettre en pratique les discours de ces adeptes de la cancel culture, call- out culture et autres anti- appropriations.

Selon les mots de Coutts-Smith, « Colonialism did not appear in the modern world with the forays of Cortez into Yucatan, or with the destruction of Tenochtitlán[10], but with the claim of historical cozenage extended by Renaissance mercantile republicanism towards the exemplers of a dimly-remembered Roman Polis observed through the roseate lenses of political ambition and swiftly- consolidating class interest. »[11] Ainsi dire, le colonialisme est moins une affaire de géographies que celui d’un rapt culturel de classe. La classe détenant le pouvoir s’approprie des ersatz de la culture des dominés et la fait sienne. Il suffit de penser aux copies antiques romaines des modèles grecs pour comprendre à quel point ce modèle de dominance se perpétue à travers les siècles. Selon Kenneth Ize, mettre en pratique les discours revendicatifs de l’anti appropriation, c’est citer et faire participer les héritiers de ces cultures, et non plus les anonymiser, les invisibiliser tout en leur empruntant et amassant des fortunes sur des populations millénaires dont les descendants sont exclus. Inclure, pourrait être son maître mot, en ce qu’il ne communique jamais sans introduire ses collaborateurs, l’origine des savoirs qu’il utilise, le tout en relocalisant. Ize ne se contente pas de créer des vêtements, il s’évertue à faire du consommateur, un acheteur éclairé avant tout.

On pourrait se demander s’il s’agit là d’une simple stratégie marketing ? Mais après s’être installé au Niger, pays susceptible d’être en proie à des attaques fréquentes, du fait de sa frontière avec le Mali, soit quoi qu’on en dise, plus dangereux qu’une campagne viennoise, et avoir autant investi sur place, dans une usine, des écoles, des artisans, force est de constater qu’il n’y a qu’assez peu de place au doute. Se revendiquant d’une certaine sincérité créative et politique, loin de chercher à plaire à une clientèle quelconque, ciblée, marquetée, Ize prend le parti de faire une mode pleine de ces mythologies personnelles que l’on peut retrouver dans toute cette jeunesse à la culture plurielle, venant d’ici et d’ailleurs, et refusant de se laisser enfermer dans une identité univoque. Im Pan-African. I love my culture so much and there is so much to share. And my clothes might not say it in your face, but the reason I am doing them is very political. Im not going to compromise my culture, my Blackness, my sexuality, my gayness. Im not going to compromise who I am.”[12]

Et loin de ne se cantonner qu’à sa propre histoire, Ize choisit de s’ouvrir à des cultures autres en intégrant, par exemple, du jean japonais dans sa collection prêt à porter printemps/ été 2021, en le mentionnant, sans l’invisibiliser. Ce qui ne peut manquer de faire écho au côté délicieux de ce monde désormais global, car il en faut un, où les civilisations s’enrichissent, s’empruntent et surtout tendent à se restituer, sans transmuer des savoirs comme des faires, en leur propriété seule. L’intérêt de sa démarche ? Une mode africano- européenne, à son image, non néo- coloniale, ou coloniale tout court, inclusive, à contrario des sapeurs congolais desquels on ne saurait tenir grief, en ce qu’ils expriment un temps de l’histoire entre ces deux continents, qu’ils ont d’ailleurs su magnifier et surtout transcender, mais qui est désormais révolu (ou qui tend encore à l’être). Ize permet d’entrapercevoir ce que peuvent être et ce que seront sans doute les relations européano- africaines, délestées d’une ascendance coloniale mortifère ou encore trop paternaliste, et d’autres despotes natifs du continent, dont les intérêts semblent bien éloignés de leurs populations. Populations africaines qui voyageront davantage, sans forcément toujours immigrer – dans les conditions sordides que l’on connait – mais en s’expatriant eux aussi, ou participant davantage au tourisme mondial. Cette mode métisse que Kenneth Ize ébauche, c’est aussi l’idée de se choisir double, ou simple, mais dans chaque cas de se choisir, sans avoir à renier une partie de soi, comme le préconise encore pourtant certains discours politiques, pour lesquels le pluriel – ou multiculturalisme, ne peut ni ne doit être. Pourtant l’histoire suit son cours, et chose impensable auparavant, on mélange désormais de la dentelle autrichienne au fameux tissus Yoruba, les deux tissés à la main, sans que cela ne choque, ou ne détonne particulièrement. Plus que simplement offrir une vision du multiple, Ize nous permet de nous souvenir que le monde n’a sans doute pas été divisé entre deux blocs, comme on peut le lire pourtant chez Huntington[13], mais que les échanges et syncrétismes ont toujours été de mise, il y a 50 comme 500 ans, plus encore dans un monde globalisé à l’aune de ce XXIème siècle : « Je travaille avec de l’aso- oke du Nigeria et de la crêpe de soie brodée d’Autriche, ce qui est marrant parce que c’est là que les Nigérians voyageaient dans les années soixante pour acheter du tissu. »

Ce à quoi on peut ajouter ce modèle phare de la collection qui le fit connaître dans le monde entier soit celui que portait Naomi Campbell, une robe chemise tissée de multiples rayures tricolores, se terminant par des franges, ressemblant étrangement au costume que portait König von Boussa (entendez le Roi de Boussa) en 1854 sur la gravure de Heinrich Barth, explorateur allemand, traversant alors les régions du Niger pour se rendre à Tombouctou, alors soutenu par la Grande- Bretagne afin de dit-on, lutter contre la traite négrière. Et cela, avant la colonisation française du Niger qui prendra dix ans (1890- 1900). Un choix qui n’est pas dû au hasard donc.[14]

 

Droite : Naomi Campbell au défilé Kenneth Ize, prêt-à-porter féminin automne-hiver 2020-2021. Getty.

 

Sans peut être l’avoir réellement voulu, le travail de Ize est plein de ces clins d’œil aux relations passées entre Afrique et Europe. Et dans ce parallèle à une Afrique pré-coloniale, que l’on imagine encore trop souvent comme un territoire peuplé de peuples disparates et non civilisés, sans technologies, vivant nus comme des animaux et loin de toute organisation sociale ou même de sens (autre que purement animal, instinctif.) À l’instar de ces rayures verticales synonyme de taxinomie sociale, qui dans la Cour de François1er devinrent aristocratique, alors que sa consœur horizontale était et continue d’être aujourd’hui la distinction des parias, aliénés, juifs, musulmans, prisonniers ou bagnards en Europe. En Afrique, la rayure a toujours eu une grande place : il existe d’ailleurs toujours le kanvo originaire du Bénin, le Faso dan fani du Burkina, le kita (ou kente) des Ghana et Côte d’Ivoire, autres formes de rayures tissées. Ces tenues rayées étaient en Afrique subsaharienne, réservées aux hauts dignitaires ; puis elles devinrent principalement des habits de cérémonies, et le sont encore aujourd’hui. Car contrairement à ce que l’on pense, le wax n’est pas un tissu originaire d’Afrique, mais aurait été importé par des colons hollandais dans les années 1800 depuis les régions alentours de Bali. Il n’est d’ailleurs pas produit en Afrique, mais en Indonésie principalement. Quant à ces rayures en diagonales, elles évoquent non sans dire la part d’indiscipline revendiquée de ce jeune créateur qui entend bien bousculer le milieu de la mode. Ainsi, pour l’automne/ hiver 2021- 2022, Ize a voulu témoigner de la noirceur ambiante, entre crise sanitaire, crise politique (mouvement Black Lives Matter, ou encore manifestations contre EndSARS au Nigéria) et enfermements. L’intensité de sa palette vue au dernier show a donc été vite remplacée par des tons plus saturniens, comme le noir, le gris, le marron, ou encore le bleu.  La collection est présentée en extérieur, avec pour fond des tissus étendus sur un fil, ne manquant pas d’évoquer tous les pays chauds, où la pratique d’étendages n’a pas encore été interdite. Ces figures de l’intime où l’on accroche vêtements et sous-vêtements à la vue de tous sans se soucier de ce que l’on montre de soi. Comme le fait Ize quant à ses identités culturelles. Ces fils tendus en arrières fonds, ces tapis de sol, ne manquent pas non plus de rappeler les racines en commun avec les populations Touaregs, du peuple nigérian.

À ses larges rayures il a cette fois ajouté un imprimé Ouroboros, représentant un serpent (ou dragon) qui se mord la queue, symbole des nouveaux cycles à venir pour cette collection intitulée « Le cercle de la naissance et de la mort ». En termes de symbole il y a aussi cet œil imprimé sur certaines pièces, ressemblant à l’œil présent sur le billet de 1 dollar nord-américain avec les mêmes teintes. Symbole de la providence, entouré de ce serpent qui se mord la queue. Un nouveau cycle providentiel en débuts pour le monde de la mode, un monde plus inclusif.

On retrouve pour l’automne/ hiver 2021- 2022, l’étoffe aso- oke, aux larges rayures, mêlée à des pièces plus sobre et classique d’un vestiaire européen (trench, blazer, jupe fendue). Est présente de la laine de mérinos provenant d’Italie dans des teintes brunes ou bordeaux, dans des pièces minimales, alliées à des largeurs nord africaines aux proportions décontractées et des coupes droites clairement asiatiques. Présents également nombre de vêtements mi-partis (également appelés bicolores). Symbolique chrétienne ou pas dans ce cas, au Moyen-Âge on ne mélange pas les couleurs, cela étant signe de désordre, chaos, voire de l’Enfer.

La vidéo de présentation de la collection débute sur un plan où sont installés, nombre de bijoux, inspirés des grigris des marabouts, guérisseurs et autres sorcier.e.s (inyanga, nganga, etc.) de l’ère pré-monothéismes, quoique ces pratiques perdurent encore, ou bien New Age, on ne saurait trop dire s’il tire son inspiration de l’une ou de l’autre, mais à la puissance en tous les cas apotropaïque. Ce qui est intéressant quand on sait que s’il y a bien un sorcier redouté par les peuples africains, c’est l’étranger, en ce qu’il déséquilibre la vie sociale, étranger qui tend à disparaître à travers le discours politique de Kenneth Ize. La couleur, mise de côté pour cette collection, a laissé place aux imprimés et textures, encadrées par des coupes étroites, droites, structurées mais aussi près du corps, avec des tissus spandex stretch dans un esprit très années 1990. Certaines silhouettes ne manquent pas d’évoquer des quartiers de Paris, où les hommes portent des robes : Barbès. Ce qui correspond sans nul doute à des quartiers africanisés de nombreuses villes européennes soit dit en passant.

Pour ce qui est de Paris, lieu de monstration de sa collection, la rive droite et principalement le 18ème est le lieu du syncrétisme vestimentaire, de ces hommes immigrés d’Afrique subsaharienne, qui mixent aisément le qamis[15] avec une veste issue de l’uniforme de travail : la veste de camionneur, un éclectisme que l’on retrouve notamment dans la façon dont les chefs d’Etat s’habillent actuellement au Nigeria, quand d’autres font le choix du costume trois pièces à l’européenne.

La façon dont Ize participe de la mode africaine sans forcément rejoindre un style néo-colonial est celle de l’inclusion, de l’innovation, de l’engagement politico- économique. Au regard des traces post- coloniales ou européanisante, liées à l’Histoire et à son histoire, son choix ne va donc pas vers la négation mais vers l’incorporation de ce passé, ces entrelacs, difficiles mais non pas impossibles, encore moins invisibilisés, qu’il se plait à mêler dans des pièces qu’il convient désormais de lire et non plus seulement de porter. Emprunter à une culture c’est aussi la citer, lui rendre hommage mais surtout la faire participer. Ce dont Kenneth Ize a fait son cheval de bataille : rendre le vêtement pleinement politique et appeler par ses engagements à des changements institutionnels et encore plus : économico- culturels.

 

Notes de bas de page

[1] Suite aux conflits entre les populations turques et chypriotes, forçant des déménagements constants, Chalayan conçoit une collection où les vêtements se transforment aisément en meuble, soit une maison que l’on porterait sur soi, ce qui donne tout son sens à l’habit, devenant réel habitat.

[2] https://www.nytimes.com/2019/05/01/t-magazine/kenneth-ize.html Une version papier de cet article apparaît dans le New- York Times du 5 mai 2019, section ST;, p.3, avec ce titre : Reimagining West African Fabrics.

[3] « Nous réactivons, réinterprétons et remettons en contexte des techniques artisanales qui ont donné du sens à l’identité ouest-africaine .»

[4] Considérations à atténuer, au regard de ce que l’on qualifie de quart monde, où ces populations pauvres et peu instruites des pays les plus développés. Pour aller plus loin, voir le travail de Joseph Wresinski avec l’ATD. https://www.atd-quartmonde.fr

[5] Emmanuel Bankole Ojo, spring 2007. “Printing Contemporary Handwoven Fabrics (Aso-Oke) in Southwestern Nigeria”. Design Issues. 23 (2): 31–39.

[6] Entretien à retrouver dans son entièreté à l’adresse suivante : https://region-aura.latribune.fr/debats/grands-entretiens/2015-05-20/gilles-lipovetsky-le-luxe-est-un-parfait-miroir-de-notre-civilisation.html

[7] Voir Robert Delort, Histoire de la fourrure de l’Antiquité à nos jours, éditions Edita Lazarus, 1986, 235 pages.

[8] Traduction : « La seule façon de préserver et de faire revivre tout cela est non seulement de recommencer à les faire de manière très moderne, mais aussi d’être avant-gardiste. » Propos confiés à Olivia Singer dans un article du Vogue US du 1er octobre 2020 : https://www.vogue.com/fashion-shows/spring-2021-ready-to-wear/kenneth-ize

[9] Moment de l’histoire où les hommes vont renoncer peu à peu à l’habillement ostentatoire pour adopter un costume trois pièces, de couleur sombre, qui perdure encore aujourd’hui. C’est le psychanalyste britannique John Carl Flügel qui lui en donne le nom, au cours des années 1930. Ce grand renoncement a peu à peu rejoint la sphère du féminin, la femme empruntant fréquemment au vestiaire masculin, et à mesure que sa place dans le marché du travail se fait plus prégnante.

[10] Ancienne capitale de l’Empire aztèque, détruite en 1521 lors de l’arrivée des conquistadors espagnols sous les ordres d’Hernán Cortés.

[11] Trad. : « Le colonialisme n’est pas apparu dans le monde moderne avec les incursions de Cortez dans le Yucatan, ou avec la destruction de la ville du Tenochtitlán, mais avec la revendication de cette duplicité historique étendue par le républicanisme mercantile de la Renaissance à l’instar de la cité romaine dont on a un vague souvenir, observée à travers les lunettes honteuses de l’ambition politique et de l’intérêt de classe, se consolidant rapidement. »  Kenneth Coutts- Smith, Some general observations on the problem of cultural colonialism. From the book The Myth of Primitivism, 1991, 1st edition.

[12] Traduction : « Je suis panafricain. J’aime vraiment ma culture, il y a tellement de choses à partager. Et mes vêtements ne vous le disent peut-être pas littéralement mais la raison pour laquelle je les porte est très politique. Je ne vais pas compromettre ma culture, ma négritude, ma sexualité, mon homosexualité. Je ne vais pas compromettre qui je suis. » Ibid.

[13] Samuel Huntington, Le choc des civilisations. Odile Jacob, 1997. L’ouvrage part d’une analyse dichotomique des forces en puissance dans le monde, entre pays occidentaux et « restes du monde » (voir Chap. VIII).

[14] Gauche : Roi du peuple haoussa., Nigéria. Auguste Wahlen les Peuples du monde, (Les manières, les coutumes et les costumes de tous les peuples du monde) Librairie historique-artistique, Bruxelles, 1845. Florilegius / Alamy Banque D’Images.

Droite : Naomi Campbell au défilé Kenneth Ize, prêt-à-porter féminin automne-hiver 2020-2021.

Photo Credit: Getty.

[15] Le terme qamis, issu de l’arabe قمیص, nous viendrait du latin tardif camisia, signifiant chemise. De nos jours, le qamis est le vêtement porté par les hommes musulmans, plus long qu’une chemise, se rapprochant davantage de la tunique, dont la longueur arrive juste au-dessous des genoux, pour la plupart. Il a en Afrique nombre de synonymes et accointances :  le boubou en Afrique de l’Ouest, thawb en Arabie saoudite, djellaba au Maroc, gandoura en Algérie ou encore jebba en Tunisie. https://fr.wikipedia.org/wiki/Qamis


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